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Loi sur la fiscalité Locale : Les CTD s’impatientent

L’accélération du processus de décentralisation que connait actuellement notre pays est largement tributaire du niveau d’autonomie financière qui sera garantie aux collectivités territoriales décentralisées (CTD) dont les compétences n’ont cessé de se densifier. La Charte africaine des valeurs et des principes de la décentralisation, de la gouvernance locale et du développement local que le Cameroun vient de ratifier reconnait du reste l’autonomie financière comme un attribut incontournable des CTD.

Parce qu’elle constitue une source essentielle du financement des collectivités territoriales, la fiscalité est au cœur de l’efficacité de la décentralisation. Or, la part de cette dernière dans la prise en charge financière de la décentralisation, quoique non négligeable, reste à parfaire au regard des ratios observés dans bon nombre de pays, s’agissant notamment du produit de la fiscalité propre de ces institutions. Cette structuration du financement des CTD pourrait remettre en cause leur autonomie budgétaire, l’essentiel de leurs ressources étant tiré des concours de l’Etat.

Dans un autre ordre d’idée, malgré la pluralité des impôts locaux et taxes communales, l’analyse des statistiques des derniers exercices fiscaux révèle que trois (3) impôts locaux (Centimes additionnels communaux, droits de timbre automobile, redevance forestière annuelle), sur la trentaine que compte le dispositif actuel, constituent à eux seuls plus de 90% du rendement global. Se pose alors la question de la pertinence du maintien de ces multiples prélèvements à l’utilité relativement attestée par leur rendement. L’allègement de la voilure des taxes apparaît dès lors comme un impératif afin notamment de rendre le dispositif plus lisible et davantage cohérent.

Aussi, bien que d’énormes efforts d’amélioration du climat des affaires et de rationalisation des prélèvements fiscaux aient été faits ces dernières années et malgré le taux de pression fiscale qui demeure en-deçà de ceux des pays à niveau de développement comparable, l’impression de la répartition des compétences entre les services fiscaux de l’Etat (DGI) et les CTD peut-elle apparaître comme un facteur de contreperformance.

En effet, il n’est pas rare d’observer des chevauchements de compétences entre ces structures qui se revendiquent concurremment le pouvoir d’administration de telle taxe ou de tel impôt, générant ainsi des désagréments aux entreprises et portant ainsi atteinte à la sérénité des affaires. D’où la nécessité d’une clarification définitive des rôles en vue de parvenir à l’amélioration de la collecte des impôts et taxes locaux et la mise en place des Centres des Impôts Locaux où travailleront en synergie les agents de l’administration fiscale et des communes, en vue de l’accompagnement des CTD vers l’affermissement de leur compétitivité budgétaire et leur autonomie financière.

Les Pouvoirs publics ayant constaté que cette structuration du financement des CTD et la configuration des services en charge de la mobilisation de leurs ressources pouvaient remettre en cause leur autonomie budgétaire au regard de ce que l’essentiel de leurs ressources demeure tiré des concours de l’Etat, ont jugé nécessaire de procéder à une cartographie exhaustive de la fiscalité locale telle qu’actuellement en vigueur en vue d’une analyse de sa pertinence et des perspectives de son optimisation. Pour ce faire, un Comité interministériel a été mis en place par arrêté n°000407/MINFI/MINDDEVEL du 27 août 2020, avec pour objectif de proposer des pistes de rénovation du cadre institutionnel et législatif de la fiscalité locale, afin de le rendre plus favorable au renforcement des performances budgétaires des CTD.

 

L’urgence de la refonte de la loi de 2009 portant fiscalité locale, repose sur l’idée de renforcer les performances budgétaires et l’autonomie financière des CTD en passant par des réformes, aussi bien de politique fiscale, que d’administration de l’impôt.

S’agissant des réformes de politique fiscale

Il est question de travailler, en sus du renforcement de la redevabilité des CTD vis-à-vis de leurs populations, à réduire substantiellement la voilure des impôts et taxes multiples actuellement en vigueur. Par ailleurs, il sera question de prospecter toutes les niches fiscales en soumettant à l’impôt, de nouvelles matières susceptibles de générer un rendement financier important ; de relever le rendement de la fiscalité propre des CTD en vue de le porter à au moins plus de 30% ; de créer des prélèvements pivots pour les Régions, non sans omettre la taxation sur l’environnement en vertu du sacrosaint principe pollueur-payeur.

Pour ce qui est des réformes d’administration fiscale

Le chantier consistera à consolider la collaboration entre les CTD et les services fiscaux de l’Etat notamment avec la mise en place le cas échéant à côté des CDI, des centres de fiscalité locale en y définissant un contenu propre de leurs compétences. De plus, il va falloir procéder à la consolidation de la dématérialisation des procédures des collectes et de la mise à disposition des recettes des impôts et taxes locaux directs, en prenant en compte les spécificités propres à chaque localité. D’autres réformes telles que l’amélioration du fonctionnement du Compte Unique du Trésor (CUT), pour la mise à disposition des fonds en temps réel et l’élaboration d’un mécanisme durable de formation, de sensibilisation et de toutes autres diligences nécessaires à l’endroit de toutes les parties prenantes sont urgentes.

Tous ces chantiers justifient, l’accélération des travaux telle qu’observée au sein du comité interministériel dédié, qui s’active actuellement à la mise en œuvre des dernières diligences relatives à l’organisation des concertations avec toutes les parties prenantes, préalablement à la finalisation et la transmission des avant-projets de textes matérialisant cette grande réforme attendue de tous les acteurs de la décentralisation.

Rappelons que la décentralisation consiste en la cession par l’Etat aux CTD de compétences non exclusives, accompagnées de ressources (article 56 de la Constitution). C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il a été consacré dans la Charte africaine des valeurs et des principes de la décentralisation, de la gouvernance locale et du développement local (que le Cameroun vient de ratifier) que l’autonomie financière est un attribut incontournable des administrations locales.

Au Cameroun, la mise en application des dispositions constitutionnelles qui consacrent la décentralisation (Titre X de la loi n°96/06 du 18 janvier 1996 portant révision de la Constitution du 02 juin 1972, modifiée et complétée par la loi n°2008/001 du 14 avril 2008), s’est dernièrement traduite avec la mise en place des Régions.